Chronique d’une résurrection annoncée

L’équipe technique de Vision Eeyou Istchee, composée de deux ingénieurs des ponts et de deux ingénieurs civils, a effectué une visite de terrain du 13 au 17 septembre sur l'ancienne ligne de voie ferrée reliant Grevet à Chapais.

Alors qu’une équipe de Vision Eeyou Istchee vérifiait il y a peu les infrastructures de l’ancienne voie ferrée Grevet-Chapais pour une éventuelle remise en opération, Barrette-Chapais et le Club-Motoneige Chapais s’interrogent sur l’avenir de leurs infrastructures dans ce secteur.

Selon un communiqué de la Grande Alliance, des ingénieurs de Vision Eeyou Istchee ont visité 160 kilomètres de sentier entre Grevet et Chapais du 13 au 17 septembre dernier, évaluant l’état des ponts, des ponceaux et de la plateforme le long du sentier. Le rapport sera finalisé et rendu public à l’automne 2022 après consultation auprès des maitres de trappe et des utilisateurs autochtones du territoire.

Des investissements majeurs

Mais la compagnie forestière Barrette-Chapais compte aussi parmi les utilisateurs du territoire et s’interroge sur d’éventuelles compensations qu’elle pourrait recevoir pour sa perte d’usage et ses investissements.
« Quand le chemin de fer a été abandonné, on l’a réfectionné [le chemin] sur presque 100 kilomètres et on a réparé quatre ponts. On l’utilise pour nos approvisionnements », rappelle un porte-parole de Barrette-Chapais. Il ne peut chiffrer les investissements mais ceux-ci auraient été faits régulièrement depuis 2010 et seraient majeurs. Le gouvernement aurait aussi investi de l’argent.
Barrette-Chapais a encore besoin de ce secteur pour un horizon de quatre ou cinq ans et une voie ferrée lui bloquerait des territoires d’approvisionnement.
« Il y a d’autres solutions, mais elles sont dispendieuses. Est-ce qu’il va y avoir des compensations? », questionne l’employé de l’entreprise forestière. « Je m’attends toujours à ce qu’il y ait une consultation publique pour y participer et leur faire savoir qu’on l’utilise. »
Le porte-parole de Barrette-Chapais pense néanmoins que le projet peut être intéressant pour l’ensemble du Québec s’il est connecté aux segments du QcRail le long de Billy-Diamond et vers le fleuve.

Un parcours incontournable

Le Club-motoneige-Chapais craint lui aussi la remise en service de la voie ferrée, qui bloquerait l’axe Chibougamau-Abitibi et lui ferait perdre des investissements.
Actuellement, le club de motoneige utilise 30 kilomètres de l’ancien parcours de voie ferrée entre l’île au Goéland et Desmaraisville, avec la permission de Barrette-Chapais et de différents ministères.
« Il n’y a aucun chemin pour éviter ça, aucune infrastructure pour remplacer ça, martèle le président du club, Martin Blanchet. C’est un endroit où il y a beaucoup de cours d’eau. Si on perd ça, on ferme les livres. »
Selon lui, le club a dépensé entre 300 000 $ et 400 000 $ dans le tracé depuis 1998, sans parler du bénévolat pour le débroussaillage. Une partie de cette somme provient de la Fédération des clubs de motoneigistes du Québec.
« Est-ce qu »ils vont nous rembourser? », demande M. Blanchet.

Pour le développement

Le club utilise également des petits chemins abandonnés le long de la voie ferrée, avec la permission et l’aide de Barrette-Chapais. Mais cette compagnie pourrait les reprendre avec le retour de la voie ferrée.
« Nous sommes bien ouverts au développement de la région, assure M. Blanchet. Mais si vous reprenez ce tronçon, vous mettez fin à la Trans-Québec 93 entre Chibougamau et l’Abitibi, s’il n’y a pas d’infrastructures en parallèle pour la remplacer. Sans ce segment, on oublie ça, la motoneige dans le Nord. »
M. Blanchet souligne que le tourisme de motoneige constitue un bon apport économique pour la région.
Le Club-Motoneige Chapais n’a pas été consulté par la Grande Alliance jusqu’à présent. « On nous a dit que ça viendrait plus tard, se remémore le président, mais on ne sait pas quand ni comment. »
Des tentatives ultérieures de communication avec la Grande Alliance, tant de la part du Club que de la Fédération, se seraient avérées sans résultat.
« C’est ça qui me fatigue, déplore M. Blanchet, de pas être consulté et de ne pas avoir de retour d’appel. »

Favorables

De son côté, la Chambre de commerce Chibougamau-Chapais porte un regard positif sur le projet. « Nous sommes favorables à ça », dit le président de la Chambre, Sébastien Vandal. Le but de développer cette ligne est de faire un corridor pancanadien avec QcRail du côté de la Côte-Nord. Comme nous sommes à la jonction de tout ça, nous voyons ça d’un bon œil. Un corridor ferroviaire vient renforcer la possibilité d’exploiter des mines ici. »
Quant à la Corporation de développement économique de Chapais, elle a déposé un mémoire en 2019 sur le projet Grevet-Chapais, dont elle considère les conclusions toujours valables aujourd’hui.
« La réparation du tronçon […] permettrait de faire transiger et de recevoir du matériel et des ressources naturelles de l’Abitibi et des autres régions du Canada, peut-on y lire. La remise aux normes permettrait le développement d’opportunités économiques importantes, […]¬ notamment le développement minier et des projets de notre parc industriel. »
Doré Copper possède dans la région les gisements encore inexploités de Devlin, Joe Mann, Corner Bay et Opemiska. Son président, Ernest Mast, croit que la réactivation de Grevet-Chapais peut « être utile pour la vente des concentrés du cuivre et peut-être pour l’approvisionnement de matériaux ».

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