Discussion avec Isabelle Boulay

Avec ses 5 millions d’albums vendus, sa carrière en France qui ne dérougit pas et sa place toujours au chaud dans le cœur du public québécois, la chanteuse Isabelle Boulay est sans conteste l’artiste la plus populaire que recevra le Show du Zéphir depuis ses débuts. Tête d’affiche de l’édition 2021 qui sera diffusée le 13 novembre prochain, elle nous fera le plaisir d’entendre sa si belle voix et le récit de son parcours de vie où sa santé mentale s’est déjà perdue en chemin. Discussion ouverte avec cette femme célèbre dans la francophonie, qui est encore aussi simple, humaine et humble que la petite Gaspésienne en elle

Isabelle, pour toi, qu’est-ce que la santé mentale?

La santé mentale, c’est comme une pyramide ! Y faut vraiment travailler sur les bases, parce que c’est un monde complexe, mais ça part de choses extrêmement primaires, basiques, ça part vraiment des bases de la vie. On n’a pas juste une hygiène de vie physique, y’a aussi l’hygiène mentale, et c’est important de s’en occuper. On le fait moins parce que ce n’est pas visible. Donc, on a tendance à négliger notre santé mentale. C’est quelque chose sur laquelle on doit veiller, parce que ce n’est pas tangible, ça se passe un peu dans un flou autour de notre personne, donc, y faut être alerte et rester à l’écoute de soi. La santé mentale, c’est comme une pyramide qui peut s’effondrer si on enlève un bloc, un morceau!

Selon toi, est-ce que les gens ont encore beaucoup de préjugés/tabous face à la santé mentale?

Je pense que les préjugés ou les tabous que les gens ont par rapport à la santé mentale c’est souvent relié à la méconnaissance. On est souvent mal à l’aise quand on ne comprend pas quelque chose, on est inévitablement déstabilisés. On parle de plus en plus de santé mentale fort heureusement. C’est vraiment une bonne chose. Je trouve que c’est important d’en parler et c’est important de montrer aussi qu’on peut vivre avec ça. Ce qu’il y a de pire dans la maladie mentale, c’est l’isolement. Et c’est la peur que les autres peuvent avoir quand ils y sont confrontés et qu’ils ne connaissent pas ça, ce déséquilibre qui vient perturber la personne en face de nous…

Est-ce que, toujours selon toi, une personne en difficulté doit aller chercher de l’aide?

En fait, les gens qui sont en difficulté souvent n’ont pas le réflexe d’aller chercher de l’aide. C’est souvent des proches qui vont leur proposer ou qui vont les amener à aller consulter, ou à se rendre compte de leur état. Moi, ça m’est arrivé à un moment donné. Quelqu’un que j’aime beaucoup, qui un jour refusait de prendre sa médication, qui me disait : « Je vais être obligé de prendre ça toute ma vie! » Je lui disais que, oui, mais quand tu prends tes médicaments ça se passe vraiment mieux dans ta vie, avec tes proches, etc. C’est comme un diabétique, il ne peut pas renoncer à prendre son insuline parce qu’il ne va pas survivre à ça. En fait, souvent les gens ont honte aussi parce que c’est difficile d’admettre qu’on est atteint mentalement. C’est difficile à accepter que tu vas avoir besoin d’aide. Peut-être que tu vas avoir besoin de médicaments, et peut-être toute ta vie. Mais si tu es capable d’aller chercher l’aide, de trouver les gens en qui tu vas avoir suffisamment confiance, tu vas sans doute réussir à prendre conscience de ton état et te mettre dans la position permettant de rembarquer sur ton vélo, et repartir!

Avec les années, les épreuves, qu’as-tu appris sur le cheminement vers une bonne santé mentale?

Une bonne santé mentale, ça passe par la connaissance de soi. Et de l’instinct. En fait, moi je pense qu’on le sent, mais on ne s’écoute pas tout l’temps. Et parfois, on va quand même continuer d’avancer en sachant que quelque chose ne va pas au fond de nous. Mais y’a des signaux d’alarme, y en a ! Moi parfois la sonnerie elle sonne, mais je fais semblant que je ne l’entends pas, et quand je me rends dans l’incapacité de fonctionner sans faire abstraction de l’alarme en dedans de moi, là, y’a un ménage à faire, y’a un débordement, faut que je m’en occupe… Donc, je pense que ça part de choses assez fondamentales aussi. Je pense qu’il faut avoir des bons réflexes de survie pour venir à bout de nos pertes d’équilibre et être à l’écoute de soi. Ça n’a rien à voir avec de l’égocentrisme, pas du tout. Le soi, c’est autre chose que le moi ! C’est plus ancré à l’intérieur de nous et ça veut souvent nous parler, et parfois on n’écoute pas…

Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui a des difficultés et qui les vit seul, qui vit de l’isolement, de la solitude?

Je pense que l’objectif, dans ces cas-là, c’est de témoigner de ce qu’on a, c’est de sortir de sa bulle. Même si, par exemple, y’a des gens qui vont vouloir épargner leurs proches, et bien il existe des alternatives. Y’a des lignes d’appels téléphoniques, des organismes d’aide comme le vôtre, où on va trouver des gens formidables qui sont là justement pour ça : vous aider. Des gens extraordinaires dont le cœur est ouvert. Je pense que la première chose à faire c’est de refuser de penser que tu es seul à vivre ça, et t’accorder le droit de demander de l’aide, parce que c’est peut-être là que la plus belle des réponses va t’arriver. C’est peut-être là que tu vas commencer ton processus de guérison. Et quand on lance notre main dans le vide, y’a quelqu’un à l’autre bout qui va l’attraper, c’est certain… Mais, ne te laisse pas tomber, ne te laisse jamais tomber, c’est ça que j’ai envie de dire à quelqu’un qui a des difficultés… L’évidence c’est que, si tu te manifestes, y’a quelqu’un qui va t’aider!

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