Rachat du projet Matoush

Malgré un moratoire permanent sur l’uranium en Eeyou Istchee et différents jugements survenus l’an passé, une compagnie britanno-colombienne a racheté en avril le projet Matoush de la compagnie Strateco.

L’International Consolidated Uranium est une compagnie d’exploration junior basée à Vancouver.
Elle a récemment acquis deux projets d’uranium en Australie où elle possédait un site aurifère. La compagnie est également propriétaire du projet d’uranium de Mountain Lake, au Nunavut.

Le communiqué parle d’un paiement en espèces de 3 M$ et de l’émission d’actions d’un montant identique. L’ancien propriétaire de Matoush, jadis présenté comme le projet d’uranium le plus avancé au Québec, était Ressources Strateco.
L’International Consolidated Uranium n’a pas répondu aux demandes d’entrevue de La Sentinelle.
Dans le communiqué annonçant l’achat, le président d’International Consolidated Uranium, Philip Williams, affirme vouloir « apporter une perspective fraiche au développement du projet avec un focus sur l’implication avec les parties prenantes locales et autochtones avant d’entreprendre quelque activité que ce soit ».

C’est encore non

Le directeur général du gouvernement de la nation crie, Bill Namagoose, dit avoir été avisé de la transaction le 13 mai par les avocats de son gouvernement qui ont travaillé sur le dossier en Cour suprême.
« Nous avons été très surpris par l’acquisition, rapporte Bill Namagoose. Il n’y a pas d’acceptabilité sociale pour le projet et nous n’avons pas changé d’idée. Ça a été refusé par le gouvernement du Québec. Je me demande quelle information la compagnie a eue. Je ne sais pas si elle a été informée de la position des Cris. Dans le communiqué, le président dit qu’il va essayer d’avoir l’acceptabilité sociale, mais il ne l’aura pas. »

Le chef de Mistissini, Thomas Neeposh, confirme que sa communauté n’a pas changé d’idée et est toujours contre l’exploitation de l’uranium sur son territoire.

« Nous y sommes encore opposés et je pense que le chef du gouvernement cri fera bientôt une annonce, affirme M. Neeposh. C’est peut-être une stratégie pour Strateco pour ravoir leur argent. »
Comme Bill Namagoose, Thomas Neeposh se questionne sur la connaissance qu’a la compagnie de la Colombie-Britannique du rejet du projet en Eeyou Istchee.

Historique

Le projet Matoush est situé sur des terres de catégorie III, dans les monts Otish, à environ 210 kilomètres au nord-est de Mistissini. Les collectivités de Némaska et Waskaganish sont en amont sur la rivière Rupert.
Au début de la dernière décennie, Ressources Strateco avait demandé un permis pour creuser une rampe d’exploration souterraine.
En 2010, une assemblée extraordinaire de la nation crie de Mistissini avait voté à 94 % contre le projet. Deux ans plus tard, le Grand Conseil des Cris avait déclaré un moratoire permanent sur l’uranium sur son territoire, imité en 2013 par le Québec, mais de manière provisoire. La même année, le ministère de l’Environnement et des Ressources naturelles du Québec avait refusé d’émettre un certificat d’autorisation à Strateco.
Matoush bénéficiait néanmoins de certains appuis, comme celui de la Commission canadienne de sureté nucléaire.

Poursuites

Ressources Strateco a avancé que la décision du gouvernement québécois de ne pas lui accorder de certificat d’autorisation était une expropriation déguisée et lui a réclamé 182 M$ pour la perte de ses investissements et 10 M$ en dommages punitifs. La Cour supérieure du Québec lui a donné tort en 2017, une décision réitérée par la Cour d’appel en janvier 2020.
La Cour suprême du Canada a ensuite refusé d’entendre l’appel de Strateco.

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